Les temples de Bagan

Contre toute attente, le bus de nuit est arrivé en avance, c’est-à-dire à 4h du matin…Déjà que nous savions que chercher une guest-house dans cette ville pouvait s’avérer coton, arriver à cette heure n’arrangeait pas les choses…Bien sur, des taxis sont là pour nous cueillir en annonçant des tarifs hors de prix !

Nous avons refusé de payer ce prix et pensé à quitter la gare à pied mais il y avait bien 8 km et il était très très tôt… En face de l’arrivée des bus, nous avons trouvé un café pour se poser et aviser. Cela fut très instructif. A notre table, un chauffeur de « un-peu-tout » nous a appris que la compagnie de bus fournit gratuitement la navette pour aller de la station de bus à la ville aux locaux mais que les touristes doivent se débrouiller autrement. Au bout d’un moment, nous avons sauté sur un couple pour leur proposer de partager le taxi, et le prix bien sûr. Cela a finalement fonctionné, c’était cher mais on a évité la casse.
Bagan est célèbre pour ses 4000 temples (à la louche) construits lors de la période de transition entre le bouddhisme Hindu et Mahayan et le bouddhisme Theravada qui est aujourd’hui pratiqué dans différents pays d’Asie du Sud-Est (Laos, Cambodge, Thaïlande). Pour visiter le site archéologique, trois villes peuvent servir de base : le vieux Bagan, le nouveau Bagan et Nyaung U. Cette dernière pratique les prix les moins chers –qui sont pourtant très chers – et c’est une ville assez active ce qui permet d’avoir plus de choix pour manger ainsi que l’accès au marché.
Arrivés à Nyaung U vers 5h, la nuit est encore bien noire et toutes les guest-houses sont pleines ou valent 30 dollars la nuit… Ça commence fort.  L’ambiance très matinale est mystérieuse, des moines marchent dans la rue et créent des ombres dans la pénombre. Là où se trouve normalement le marché, une longue file de novices (les apprentis moines) attendent leur pitance, une musique plutôt religieuse en fond sonore. On finit par trouver quelque chose pour dormir, la chambre sera libérée pour le check-out à 11h30, en attendant la patronne nous conseille de louer un vélo et aller voir le lever du soleil dans un temple pas trop loin, le Buledi.


Nous commençons alors notre tournée des temples instantanément. Nous ne trouvons pas immédiatement le Buledi et on tombe sur un ensemble de petits temples charmants dont l’un d’eux permet de monter par un escalier presque secret indiqué par la famille qui vit sur place. En effet, de nombreux temples possèdent leurs gardiens : une famille qui vit dans une maison en bambou dans le temple. Il semblerait qu’ils soient mandatés par le gouvernement, mais nous ne sommes pas certains. La vue d’en haut est très jolie. Le soleil se lève, il est d’une couleur rouge flamboyante, nous découvrons peu à peu les autres temples alentours et les montgolfières qui s’envolent. Il est possible de survoler les temples dans une montgolfière au lever du soleil, ne parlons même pas du prix…
Nous nous sommes ensuite rendus dans le temple conseillé, le Buledi. En montant sur cette pyramide nous pouvions à nouveau observer la multitude de temples alentours, une forêt de temple ou une mer de temple ou une armée de temples qui apparait à l’horizon. Certains plus grands que d’autres se distinguent. La plupart des temples sont fait de briques rouges mais il semblerait que la restauration qui eu lieu est très controversée car la majorité des temples construit entre le 11ème et 13ème siècle étaient fait de bois. Nous avons continué notre route dans la plaine et découvert deux autres magnifiques temples. Dans l’un d’eux, la mère de la famille qui garde le temple et ses trois enfants nous ont fait faire le tour mais ils n’avaient pas la clé pour monter. Les enfants étaient survoltés, l’un d’eux mangeait son riz dans une écuelle (ah ah ah, private joke) qu’il trimbalait partout. La femme nous a proposé de mettre du thanaka (petit rappel pour les non-assidus : la pâte que de nombreux birmans, et surtout les femmes, mettent sur leur visage). On en avait partout sur le visage et le cou quand nous sommes repartis. Retour à la ville pour manger des gâteaux attrapés au marché et se reposer.
Par chance, la chambre était prête et, surprise, elle était beaucoup mieux que nous avions imaginés. Nous savons qu’au Myanmar, les chambres dans les guest-house et les hôtels sont chères et plutôt pas terribles.
Opération repos.

Pour le déjeuner nous avons testé un curry birman : il y a en général un plat de riz, un plat de viande, une soupe et tout un ensemble de petits plats autours. Nous avons eu des légumes, une pâte de haricots d’aspect noire, une purée de haricots d’aspect jaune, une salade avec des plantes vertes mélangées à des tomates et des cacahuètes, des sortes de citrons en lamelle, du tofus, un pâte de « on-ne-sait-pas-trop-quoi » écrasée mais il y avait des oignons c’est sûr, une purée de tomates, des crudités à tremper dedans (attention, il serve une sorte d’aubergine en forme de tomate cerise comme crudité), une sorte de salade avec des pois-chiches et du piments, une autre avec du poisson séché et d’autres trucs qu’on ne connait pas et, enfin, des sortes de légumes coupés en quartier avec de l’huile et du piment. OUF ! Oui, tout ça, mais dans des petits plats !
Honnêtement, on n’a pas tout aimé. Mais au moins, on aura goûté des choses que nous n’aurions jamais osé tester autrement. Rien que reprendre les vélos pour 5 minutes était une épreuve de chaleur. Retour à la chambre pour attendre que le soleil soit plus bas.


Visite du temple de la ville de Nyaung U, le Schwezigon, avec un très grand stupa doré et pleins d’autres choses. Enfin, un temple très beau et en activité, beaucoup de birman s’y rendent pour se recueillir. Le préféré de Youri. 




Nous sommes allés voir le coucher du soleil au Buledi, le temple qu’on nous avait conseillé le matin, en voulant éviter ceux où tout le monde va, le Schwesandaw et le Pyathada. Toutefois, nous n’étions pas les seuls à avoir cette idée. En effet, le paysage était magnifique : la forêt de temple avec la lumière qui tombe puis les trainées d’orange et de rose à l’horizon. Toutefois, l’ambiance « on-est-tous-là-coincé-au-même-endroit-à-prendre-des-photos » ne nous a pas trop plu. C’est vrai, on finit par se dire qu’on regarde le coucher de soleil parce qu’il FAUT le faire et qu’il FAUT avoir de belles photos, mais que profiter du moment n’est plus le premier objectif. Ce n’est pas la première fois qu’on se fait la réflexion mais cela lui donne à nouveau du grain à moudre, la multitude de possibilité pour prendre des photos : appareils en tous genre dont beaucoup de gros réflexes, smartphones, tablettes et tiges pour pouvoir faire des selfies confortablement ; ça gâche un peu les choses. Disons que le moment présent n’est plus vraiment d’actualité, il s’agit surtout de pouvoir le prouver…


Le lendemain, nous nous sommes levés à 5h pour pouvoir être dans un temple au lever de soleil et profiter de la fraicheur matinale. Partis pour louer un vélo électrique, nous avons perdu un peu de temps car un coup le vélo pédalait dans la semoule, un coup il était bloqué par les freins. Bref, pas facile de trouver un vélo correct. Cependant, le vélo électrique c’est magique. Ça demande beaucoup d’effort, un truc de grand sportif en quelque sorte, un truc pour Youri quoi.


Nous n’étions donc pas exactement dans un temple quand le soleil s’est levé mais sur des petits chemins à se demander dans lequel s’arrêter.  Nous en avons trouvé un parfait, vraiment par hasard, et c’était du pur bonheur. En trouvant la cachette de l’escalier pour monter, nous avons atteint une jolie petite terrasse surplombant la plaine des 1000 temples, ou non 4000 pardon. Magique. Tous les deux à regarder la lumière se lever sur les temples de Bagan en mangeant des gâteaux au sésame. L’avantage de Bagan est qu’une fois sortis des sentiers battus, c’est-à-dire des temples réputés et du coucher/lever de soleil à certains points stratégiques, on ne croise pas beaucoup de touristes. Il suffit de se perdre un peu dans les chemins de plaines qui se situent entre Nyaung U et le vieux Bagan pour se trouver en paix. Certains temples sont beaucoup côtoyés par des Birmans. A ce propos, en visitant le Dhammayangyi, un grand temple de forme pyramidale, nous avons été sujets à des prises de photos successives par un groupe de femmes birmanes. Cela avait déjà été le cas à la Schwedagon Phaya de Yangon. Les femmes nous ont mis l’enfant entre nous pour prendre des photos, puis elles ont chacune leur tour posé avec nous sur les photos. Du coup, on a aussi demandé à avoir des photos. Nous qui hésitons pas mal à prendre les gens en photo, c’était un peu l’occasion rêvée. Après une dizaine de photos, on s’est levé parce qu’on ne voulait pas y passer la journée non plus.



Nous avons aussi vu plusieurs temples avec des fresques. Certaines représentent la Jataka, c’est-à-dire l’histoire de la vie de Bouddha ; d’autres de multiples Bouddhas (toujours lui) ! C’est vraiment joli et certaines sont bien conservées.
Comme la veille, grande pause de survie pendant les heures chaudes avant de repartir pour de nouvelles aventures. Oui, « aventure » on ne pèse pas nos mots. Nous avons bien crevé une fois chacun. La première fois, le temps que Youri se rende compte que son pneu était à plat, un homme et un enfant l’avaient pris en main. Ils mirent une sorte de rustine de façon artisanale. Nous avons pu visiter le temple Ananda qui est en pleine restauration. On remarque que tous les murs n’ont pas la même couleur. A l’intérieur différents Bouddhas debout et de nombreux autres encastrés dans les murs dans différentes positions, tous dorés. Quelques restes de fresques également.



Lorsque nous sommes sortis, on s’est rendu compte que le pneu avant du vélo de Séréna était crevé et nous sommes retournés voir les mêmes personnes à la sortie du temple pour nous venir en aide. Après retour au bercail ! Privés de coucher de soleil ! D’après ce que l’on a dit à ce propos plus haut, on peut considérer que c’était pas si important !




Notre visite à Bagan suscite des sentiments contradictoires en nous. Le côté ultra-touristique de la chose n’est pas pour nous plaire. Les prix sont assez élevés pour se loger, le "pass" pour la visite augmente de 5 dollars chaque année, cet argent entre directement dans les poches du gouvernement, tout un tas de commerce se développent autour comme les vendeurs de peinture au sable ou les enfants qui proposent des dessins standardisés à la sortie des temples. Il semblerait que quelques ventes par semaine permettent de gagner plus qu’en travaillant à la ferme. Cela explique l’intérêt de se poster à la sortie des temples et de vendre la même chose que son voisin. Nous avons aussi lu que les enfants quittent de plus en plus l’école pour vendre ces fameux dessins autour des temples les plus célèbres. Leur façon de nous aborder est quelque peu surprenante, ils portent parfois des masques de bob l’éponge et nous ordonnent d’acheter d’une façon assez autoritaire, ils savent même dire les phrases nécessaires dans plusieurs langues : « C’est joli, c’est pas cher. ». Ils ont entre 6 et 12 ans. Ce genre de situation n’est pas une découverte mais cela fait un peu mal de constater que l’essor du tourisme conduit à ce type d’effets pervers. Nous avons aussi noté que les gens sont moins sympathiques, surtout quand ils sont engagés dans le business touristique.


Toutefois, la visite des temples ne se fait pas dans un flot de touriste. Cela n’a rien à voir avec les temples d’Angkor au Cambodge. De plus, ce site reste important pour les birmans qui viennent le visiter et se recueillir. Bien sûr, cette multitude de temple dans le secteur est majestueuse. Cela offre un paysage unique qui restera gravé dans nos esprits. Les images des temples de Bagan sortant de leur torpeur au lever du soleil qui nous faisaient rêver nous ont conduits jusque-là et nous ne le regrettons pas. Mais qu’en sera-t-il dans quelques années ?


4 commentaires:

  1. Content d'avoir de vos nouvelles. Ici la chaleur ne pose pas de problèmes (à Paris en tout cas). Je suis bien vos réflexions sur le fait de profiter du moment plutôt que de le prendre en photo. Toutefois, j'ai regardé avec plaisir les photos que vous avez prises tout de même ; particulièrement celle avec le soleil blanc/jaune sur fond orangé, et des temples partout.
    A bientôt.

    Tonton Simon.

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  2. Houlala tous ces temples, mais existe-t-il une vie en dehors des temples au Myanmar ? Quand je pense à ta capacité de résistance passive lorsque nous visitions une énième pagode en Thaïlande, Youri, je n'en reviens pas que tu sois si enjoué !
    Alors c'est vrai que les photos peuvent polluer le moment présent mais quand même nous on aime parce que c'est juste magnifique ...
    On pense tous bien à vous et on vous embrasse tout plein

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  3. Bravo Youri tu as réussi a trouver des vélos électriques !
    Courage a vous ça a l'air très difficile.
    Coco

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  4. Je me demande pourquoi vous vous occupez tant des autres lors de supers points de vue comme ceux que vous avez pu avoir au coucher du soleil sur les temples...
    Je sais combien parfois les centaines de touristes peuvent altérer la magie du moment, mais au final...on s'en fou, non ?
    Ce que je veux dire c'est que c'est vous et seulement vous qui vous "gâcher" un peu l'instant en vous posant toutes ces questions...et si vous décidiez simplement de trouver ça beau, parce que oui, beau, vous trouvez que ça l'est ?
    Je me souviens du nombre incroyable de personnes qu'il y avait au levé du soleil sur le Grand Canyon...mais à bien y réfléchir, pourquoi se pourrir le moment parce que d'autres ont eu la même idée ? Pourquoi ne pas juste profiter ?
    A part ça, vous êtes parfaits :) !
    Je suis passé devant votre ancien chez vous bordelais, par hasard total. C'était cool.
    Des gros bisous !

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